« Territoire partagé »
Chapelle du Quartier Haut, Sète, 2013
« Territoire partagé »
Chapelle du Quartier Haut, Sète, France, 2015
« Réparation » Ces œuvres protéiformes explorent les changements et caractéristiques de la matière et questionnent les techniques anciennes de la sculpture à travers deux séries : les réparations et les moulages de tripes.
Les réparations sont des objets, journaux et photographies qui témoignent d’une destruction, d’une catastrophe. Entre fouilles archéologiques et vestiges d’un temps révolu, la mémoire hante ces objets. Le temps érode la matière et le recouvrement par du plâtre en fixe un état tout en le faisant disparaître sous une seconde peau. En variant ainsi leur aspect, il s’agit d’inventer une mémoire et d’une certaine manière de proposer un dialogue improbable entre les notions de copie et d’original, entre le modèle et le moulage, entre le présent et le passé. Ces travaux questionnent divers enjeux – ceux du geste et ceux du sens de l’œuvre – répétition, redoublement, déplacement et épuisement d’une forme, d’une image, à force de modulations, de passages d’un support à un autre, de glissements d’un processus à un autre et aussi d’une histoire dans l’histoire. Les documents historiques plâtrés, issus de la collection Réparations sont composés à partir de documents sortis de leur contexte (livres d’histoire, photographies, cartes postales anciennes, journaux, sacs de courses). Ils deviennent signifiants par leur mise en commun ou leur répétition, le sens naissant des interprétations qui en découlent. La nature de ces objets est dès lors modifiée. Ils perdent leur fonction d’usage initial pour devenir l’illustration du souvenir. Ils gagnent un nouveau statut proche de l’archive : documenter, remémorer, représenter, interroger. Ces objets et documents transférés sur peau, plâtrés, combinés au dessin ou rehaussés offrent ainsi la possibilité de créer une mémoire. L’événement vécu qu’ils évoquent est fini alors que la remémoration est infinie. Elle l’est d’autant plus qu’elle relève d’un processus à la fois plastique et relationnel et qu’elle n’a rien à voir ni avec la fixité, ni avec la vérité.
Les livres et Documents historiques relatifs à la première et à la Seconde Guerre mondiale plâtrés dans la collection « Réparations » deviennent signifiants par leur mise en commun et par la répétition du geste de la technique du plâtre. Ce geste peut lui-même amener un sens naissant d’une interprétation du terme réparation : faire vivre ou rappeler une mémoire afin soit de réduire un traumatisme, soit d’éviter la reproduction d’un phénomène historique similaire. Dès lors, comment réparer le passé à travers un simple volume ? Cette action sur des livres d’Histoire est similaire au processus suivant, par exemple, la fracture d’une main ou d’une jambe : face à cette fracture, on met du plâtre pour réparer la blessure, la souder ou agir directement sur la partie du membre en souffrance. Néanmoins, contrairement à la réparation orthopédique, la nature des objets plâtrés est modifiée. Ils perdent leur fonction initiale, d’information ou de propagande, pour devenir l’illustration du souvenir. Ils gagnent un nouveau statut proche de l’archive : documenter, remémorer, représenter, interroger. Ces objets et documents plâtrés offrent ainsi la possibilité de créer une mémoire pour nous ramener à la vulnérabilité du monde, elle nous conduit à regarder au-delà des choses, le visible n’étant que le support de l’invisible.